Hier soir, la pluie a commencé à tomber. Et toute la nuit, il a plu. Une pluie fine et régulière. La région en a bien besoin. Les sols sont secs, durs. Il a très peu plu depuis le mois de mai. Une situation anormale par rapport aux années précédentes.
Quand je quitte la chambre d’hôtes vers les 10h, le ciel est uniformément gris. Il fait frisquet, 8° peut-être. Mais il ne pleut pas. Pour la première fois, j’ai sorti mon pull. Dès les premiers pas, j’entends plusieurs chiens aboyer en contrebas, dans les bois. L’hôtesse m’avait prévenu avant de partir : « Attention, nous sommes dimanche, il y aura beaucoup de chasseurs sur votre route ». Effectivement, la chasse est très répandue dans la région. Me voilà prévenu ! Quelques centaines de mètres plus loin, je tombe sur deux chasseurs en embuscade. Ils me voient arriver, me font de grands signes de leurs bras. Que dois-je faire ? Continuer ? Rebrousser chemin ? Je décide de continuer. Après tout, je suis sur un chemin de randonnée balisé, le chemin appartient à tout le monde ! Arrivé à leur hauteur, ils entament la discussion. Ils semblent sympathiques. Ils me disent que c’est la chasse au petit gibier (faisan, perdrix, lièvre), qu’il n’y a pas grand-chose, qu’ils sont plus là pour le plaisir de la nature et qu’ils attendent le 18 octobre, date d’ouverture de la chasse « en battue » pour les gros gibiers. Bon, je repars tranquille, d’ici le 18 octobre, je ne serai plus dans la région !
A l’heure de midi, j‘arrive à Druyes-les-Belles-Fontaines, village de 300 habitants. Pour la première fois depuis la fameuse journée du 1° mai où la météo avait été digne d’un mois de novembre, une odeur de fumée me prend à la gorge, signe que les habitants du village ont remis en route les feux de bois dans les cheminées. Au centre du village, une petite épicerie. Je rentre avec l’idée d’acheter les provisions pour le dîner du soir. C’est l’heure de grande affluence. 3 hommes font la queue à la caisse. Surprise, pas un ne paie : « Tu le mets sur ma note, hein, comme d’habitude ! ». La commerçante enregistre sur un cahier les dépenses de chacun. En fait, les clients paieront en fin de mois. Comme à l’ancienne. A mon tour de passer en caisse. Je questionne la commerçante : « Et moi, c’est ok aussi pour mettre ça sur ma note ? ». Grand sourire de la vendeuse. Je suis dans un autre monde. Ici, tout le monde se connait, se fait confiance. Avant de partir, je lui demande s’il existe un bar dans le village où je pourrais manger ce midi. Elle me répond qu’il y a un bistrot à 100 mètres à droite. Parfait. Je sors, remonte la rue du village et cherche désespérément ce fameux bistrot. Introuvable. J’ai dû mal comprendre ! Tant pis. Je ne mangerai pas ce midi.
En quittant le village, je croise un chasseur qui revient de sa sortie matinale. Il porte un sac à dos d’où dépasse la tête d’un lièvre. Malheureusement, ce pauvre animal en s’éveillant ce matin, n’imaginait pas qu’il vivrait aujourd’hui ses derniers instants !
Je quitte Druyes en empruntant une ancienne voie ferrée qui reliait le Loiret à la Nièvre. Les rails ont été retirés. C’est maintenant devenu un chemin de randonnée. J’imagine l’intense activité qui tournait autour de cette voie ferrée dans la première moitié du XX° siècle : transport de bois, de grains, de pierres, de productions locales à destination des villes et de la capitale. Tout cette activité a disparu aujourd’hui, remplacée par le transport en camion. La marche se poursuit. Elle est agréable. Bien que le terrain soit rocailleux, je place chaque pas sur les touffes d’herbe et feuilles humidifiées par les pluies de cette nuit. Cela permet de mieux encaisser l’impact du contact du pied avec le sol. La pente ascendante du chemin est faible mais régulière. Toujours personne.
Après le lieu-dit Les Roches, j’emprunte une route étroite goudronnée qui monte sans discontinuer et qui m’amène sur un plateau. J’embrase alors une superbe vue à 360° sur 10 à 15 kilomètres quasiment vierge de toute construction humaine. Les champs viennent d’être remués. Les terrains sont très pierreux. A se demander comment les agriculteurs arrivent à retourner leurs terres sans casse de matériel. Je continue à marcher sur ce plateau et soudain, sur ma droite, je vois nettement à 100 – 150 mètres, trois chevreuils dans un champ en contrebas. Première rencontre depuis mon départ de Bâle. Il était temps. Magnifique spectacle.
Il est maintenant 15h et les premiers rayons de soleil commencent à percer à travers l’épaisse couche de nuages. Les tonalités des paysages changent rapidement. D’une palette de gris, on passe à une palette de vert. La nature est une beauté dont on n’a pas forcement pleine conscience. J’apprécie ces minutes si particulières. J’applaudis ce spectacle.
A un kilomètre de la chambre d’hôtes, j’aperçois dans le talus d’un vallon plusieurs chasseurs. Ils marchent par deux. Pas sûr qu’à cette heure-ci de la journée il y ait du gibier !
Andryes - Thury : 17 km / 4h (cumul 575 km / 137h)
Département : Yonne (89)
Région : Bourgogne
Paysage : ** aux Roches, un panorama à 380°, 100% nature
Météo : ciel couvert. 11°
Hébergement à l'arrivée : chambre d'hôtes
Le physique : c'est tout bon !
Le moral : le physique va, tout va !
Changer de vie.
Les propriétaires actuels de chambres d’hôtes qui exerçaient il y a 15 – 20 ans un tout autre métier et qui se sont reconvertis dans la tenue de chambre d’hôtes
© Philippe MATHON