Drôle d'impression ce lundi matin. Marie-France ayant pris le chemin du retour hier soir, me voici seul pour la première fois depuis le départ. J'ai beau me dire que cette situation fait pleinement partie de mon projet, la sensation est particulière : heureux de me lancer dans cette petite aventure et un brin mélancolique de me retrouver seul. Cette solitude voulue, il va falloir l'apprivoiser. Et pour commencer, j'ai bien l'intention de forcer le destin. Cela passera par le bonjour cordial systématique des personnes que je rencontrerai dans la journée, dans les villages, dans les champs ou sur les chemins. En marchant, j'ai constaté qu'une personne sur deux que je croise me salue, soit d'un bonjour, soit d'un signe de la tête ou de la main. Cette attitude toute simple a pour effet de me rendre sympathique la personne en question. Nos habitudes de citadin nous ont rendus insensible à la présence de l'autre. En tout cas, c'est mon cas ! Je vais donc me lancer ce petit challenge dès aujourd'hui.
Je quitte l'abbaye d'Oelenberg à 10h30. Dix minutes auparavant, j'avais laissé mon sac à dos à un chauffeur de taxi qui me le déposera à l'arrivée de l'étape. La forte douleur au genou gauche ressentie samedi dernier m'oblige à la prudence si je veux tenir la distance. Nous sommes en pleine campagne avec en fond, les contreforts des Vosges. Aucune habitation. Le ciel est dégagé. La température autour de 10° est idéale. Le soleil est dans le dos, confirmant le bien fondé de mon choix d'une traversée est - ouest. En effet, marchant tôt le matin, je suis sûr de ne pas avoir le soleil de face et ainsi de profiter à plein de la beauté des paysages. Dans un champ, un agriculteur dans son tracteur retourne la terre. Il passe à 50 mètres de moi. Je le salue de la main et lui fait un sourire. De sa cabine fermée, il me renvoie le salut. C'est idiot mais son geste de la main me fait plaisir. C'est ce genre de bonheur tout simple que je suis venu chercher dans cette marche à travers la France des coins perdus.
Je traverse le petit village de Schweighouse où je dénombrerai 5 maisons à vendre. Comme dans les villages précédents, les maisons sont individuelles avec souvent un grand jardin bien entretenu. Dans un de ces jardins, une vieille dame me regarde passer en tournant la tête lentement au fur et à mesure de mon passage. Elle me fait penser à l'histoire de la vache qui regarde passer le train, elle étant la vache et moi le train. Je lui dis bonjour mais aucun retour de son côté. On ne peut pas gagner à tous les coups !
Pour éviter de forcer sur le genou, j'avais décidé, avant de partir, de modifier une partie du trajet de l'étape et d'emprunter la départementale 483 sur un petit 5 km. Cela me faisait gagner quelques kilomètres par rapport au chemin initialement programmé. Quel horreur ! Un ballet continu de camions et de voitures dans un bruit insupportable. J'accélère le pas et trouve rapidement un chemin vicinal. Quelques centaines de mètres plus loin, le calme plat est revenu. C'est décidé. Je ne renouvellerai plus ce genre d'expérience.
En milieu d'après-midi, j'arrive à Bellemagny, terme de l'étape. Aucune douleur dans le genou. Quel soulagement ! Je vais pouvoir continuer mon petit périple. J'ai bien quelques cloques à chaque pied mais j'ai décidé de ne plus en parler car elles ne m'empêcheront pas d'atteindre mon but !
Abbaye d'Oelenberg - Bellemagny : 16 km / 3h30 (cumul 71 km / 15h30)
Département : Haut-Rhin (68)
Région : Alsace
Paysage : ** (les paysages et villages du Sungdau)
Météo : ciel dégagé
Hébergement à l'arrivée : couvent
Le physique : tout va bien, la douleur au genou gauche a disparu comme par enchantement !
Le moral : douleur au genou disparue = moral en nette hausse
Les choses peuvent changer du jour au lendemain sans s'y attendre. Les douleurs au genou
A suivre...
© Philippe MATHON